Repenser l’identité et le nationalisme
Michel Seymour, professeur en philosophie de l’Université de Montréal, présentait sa conférence Tous ces pays rassemblés le 10 mars au Cégep Beauce-Appalaches à Saint-Georges. Il proposait une réflexion sur les enjeux de l’autodétermination des nations.
En premier lieu, Michel Seymour tentait de répondre à la question Pourquoi les peuples ? Lui-même le définissait comme une entité collective et non une collection d’individus.
« C’est une population dont les membres sont liés par une ou des langues, dans des institutions de base […] inscrites dans une trajectoire historique sur un territoire donné. Il existe 193 peuples avec État, des peuples avec gouvernement sans État, comme l’Écosse, la Catalogne et le Québec, et des peuples sans gouvernement avec des institutions, dont les peuples autochtones et acadiens », disait M. Seymour.
Au cœur de cette notion de peuple, le philosophe expliquait notamment la nécessité de tenir la Commission de vérité et réconciliation. Celle-ci documentait les impacts des pensionnats envers les Premières Nations. « On assume que nous ne sommes pas responsables des actes commis par nos ancêtres. Or, c’est un peuple toujours actif qui agissait de cette façon, et non pas seulement des individus », affirme Michel Seymour.
La suite de ses propos concordait avec des notions internationales liées au génocide et racisme systémique. « Pendant la Deuxième Guerre mondiale, les nazis ne s’en sont pas pris à des juifs pour tuer des individus. Ils ont tué des individus parce qu’ils étaient juifs », donnait-il en exemple.
Même dans les pays vivant une paix relative, cette lutte entre les peuples s’inscrit dans des contextes contemporains comme les changements climatiques et le capitalisme sauvage. « Tout n’est pas seulement une affaire de lutte des classes. Il y a la lutte des peuples face aux 0,01 % des riches apatrides », rappelle le philosophe.
Pourquoi le nationalisme ?
En deuxième partie de sa conférence, Michel Seymour abordait la question du nationalisme. Il y voit une idéologie faisant la promotion de l’exercice du droit des peuples à l’autodétermination. On ne doit pas la confondre avec l’indépendantisme, l’une des formes de nationalisme, ainsi que le patriotisme et le populisme, qui font appel aux émotions.
« Les peuples autochtones ont des droits collectifs sur leurs territoires. Ces droits découlent du fait qu’ils appartiennent à […] leur niche écologique collective. De la même manière que les personnes ont droit à la protection de leur intégrité physique, parce que leur corps fait partie de leur identité, les […] autochtones ont le droit à la protection de leur territoire faisant partie de leur identité », indique M. Seymour.
Des peuples nationalistes jouissent d’une autonomie gouvernementale, comme le Québec, l’Écosse et la Catalogne. « C’est un nationalisme affirmant un droit à l’autodétermination interne », mentionnait Michel Seymour.
Les nationalismes des peuples de l’Amérique latine et des pays africains, ainsi que ceux de la Russie, de la Chine et de l’Iran, ont également été abordés par le philosophe. Sans défendre les politiques de certains dirigeants dans ces contrées, il critique sévèrement l’impérialisme américain.
« Les États-Unis ont des bases militaires dans plusieurs pays. Présentement, toutes les Amériques sont sous le contrôle des États-Unis. […] Même un pays corrompu doit sécuriser son territoire. On doit défendre le droit à l’autodétermination de ces peuples, sans y intervenir constamment », conclut M. Seymour.