Rentrée parlementaire: François Legault dévoilera son plan de match mercredi

QUÉBEC — Il ne faut pas s’attendre à de grandes surprises émanant du discours inaugural qui sera prononcé mercredi après-midi au Salon bleu par le premier ministre François Legault.

Il y a fort à parier que ce discours, qui constituera le plan de match du gouvernement pour les quatre prochaines années, aura des airs de déjà vu, en continuité avec le mandat précédent. Rappelons-nous que le slogan électoral de la Coalition avenir Québec (CAQ), le parti qui forme le gouvernement depuis 2018, était «Continuons».

La nouvelle session parlementaire, qui débute mardi, sera en fait une mini-session éclair, expédiée en seulement huit jours, jusqu’au 9 décembre, soit bien peu de temps pour légiférer. Les parlementaires auront à peine le temps de faire connaissance, et pour nombre d’entre eux, de se familiariser avec les lieux, ne serait-ce que savoir quel fauteuil leur est attribué, que déjà ils seront appelés ailleurs.

On s’attend à ce que seulement deux projets de loi soient déposés dans les jours qui viennent, le premier, pour lutter contre l’inflation, en fixant un plafond annuel de 3 % d’augmentation aux tarifs gouvernementaux (permis de conduire, d’immatriculation, etc.), le second proclamant que le serment au roi Charles III, une condition essentielle pour siéger à l’Assemblée nationale, deviendrait facultatif.

Mardi, la reprise des travaux fera toute la place à l’élection à la présidence de l’Assemblée. C’est un secret de Polichinelle que c’est la députée de Montarville, l’ex-ministre de la Culture, Nathalie Roy, qui occupera la fonction. Avant elle, une seule autre femme avait été présidente de l’Assemblée nationale, Louise Harel, de 2002 à 2003. Elle sera entourée de trois vice-présidents: Chantal Soucy (Saint-Hyacinthe), qui passera de deuxième à première vice-présidente, Sylvain Lévesque (Chauveau), qui deviendra 2e vice-président et Frantz Benjamin (Viau), qui occupera le poste de 3e vice-président, un poste réservé à l’opposition officielle.

Mme Roy risque de devoir apprendre rapidement son nouveau métier, étant vraisemblablement appelée avant longtemps à se prononcer sur plusieurs sujets délicats: le sort à réserver aux trois députés péquistes, qui n’ont pas prêté serment au roi Charles III, la place à accorder éventuellement au chef du Parti conservateur du Québec Éric Duhaime, même s’il n’est pas élu, et surtout la pertinence de procéder à une vaste réforme parlementaire, de plus en plus réclamée par la classe politique, tous partis confondus.     

Le lendemain, mercredi après-midi, ce sera au tour du premier ministre d’annoncer ses couleurs. En novembre 2018, lors de son premier discours inaugural, un discours-fleuve de plus d’une heure, M. Legault avait insisté sur l’importance de ne pas avoir peur du changement et de faire preuve d’audace.

L’éducation devait être la grande priorité, notamment avec l’ouverture de classes de maternelles 4 ans rendue disponible à tous les enfants, une promesse non tenue. Soucieux de rejeter toute attitude «fataliste», il disait aussi vouloir s’attaquer au problème de la pénurie de main-d’œuvre dans le réseau de l’éducation, un problème qui n’a cessé de croître depuis.

Autre promesse non tenue, la réforme du mode de scrutin, un sujet qui est revenu dans l’actualité depuis l’élection du 3 octobre, et qui a suscité la grogne dans les rangs de l’opposition, avec l’importante distorsion observée entre le vote populaire recueilli par chaque parti et le nombre de sièges obtenus.

En santé, M. Legault était resté plutôt vague en 2018, promettant un meilleur accès aux médecins, objectif qui demeure plus que jamais d’actualité, et promettant un investissement accru dans les soins à domicile. Depuis, la liste d’attente pour figurer sur la liste des patients d’un médecin de famille ne cesse de s’allonger, tout comme les délais d’attente à l’urgence ou pour obtenir une chirurgie.

En 2018, la réduction du fardeau fiscal des contribuables avait aussi été identifiée comme une priorité gouvernementale. Quatre ans plus tard, ce sera encore le cas. Le ministre des Finances, Eric Girard, fera le point le 8 décembre sur la situation économique et financière du Québec. On verra s’il a prévu de nouvelles mesures pour alléger le fardeau fiscal des Québécois.

Sa mise à jour sera rendue publique dans un contexte de repli attendu du taux d’inflation dans les prochains mois et d’un ralentissement marqué de l’économie prévu en 2023.

Au même moment, le gouvernement jouera au père Noël, en réalisant sa promesse d’expédier des chèques aux contribuables, confrontés à l’inflation: 600 $ pour ceux ayant eu un revenu inférieur à 50 000$ en 2021 et 400 $ pour ceux dont le revenu annuel se situait entre 50 000 $ et 100 000 $. Il s’agira d’une aide financière non récurrente, versée dans les prochaines semaines, qui va soulager le Trésor public de quelque 3,5 milliards $.

Une nouvelle assemblée

L’Assemblée nationale issue de l’élection du 3 octobre sera passablement différente de la précédente. Des 125 députés qui y siégeront à compter de mardi, 37 y mettront les pieds pour la première fois, dont huit ministres et un chef de parti, sûrement tous fébriles à l’idée de jouer leur nouveau rôle d’élu et pressés de connaître tous les rouages du parlement et ses nombreux règlements. 

Le premier ministre Legault voulait un mandat fort et il l’a obtenu, ayant fait élire 90 députés, réduisant d’autant la place et la force de frappe attendue des partis d’opposition au cours du présent mandat.

Le chef du Parti québécois (PQ) et député de Camille-Laurin, Paul St-Pierre Plamondon, fait partie des recrues et il devra se familiariser avec son nouveau rôle de chef du troisième groupe d’opposition. Lundi, on ne savait toujours pas si lui-même, et les deux autres élus péquistes, Joël Arseneau et Pascal Bérubé, seraient présents au Salon bleu, n’ayant pas rempli une des conditions requises, à savoir de prêter serment au roi Charles III.

Le député libéral de LaFontaine, Marc Tanguay, devra quant à lui s’habituer à jouer son nouveau rôle de chef de l’opposition officielle, devant interpeller régulièrement le premier ministre à la période de questions, et de chef libéral par intérim. 

Chose certaine, à compter de mardi, l’opposition libérale devra mettre de côté ses querelles internes pour se concentrer sur la critique des actions gouvernementales. Depuis la défaite cuisante du 3 octobre, l’équipe libérale traverse une crise majeure, qui s’est soldée par la démission de la cheffe, Dominique Anglade, et l’expulsion de la députée de Vaudreuil, Marie-Claude Nichols, désormais indépendante. Le caucus libéral est passé de 21 à 19 députés.

La course à venir au leadership au Parti libéral du Québec (PLQ), au cours de l’année qui vient, deviendra aussi, sans doute, une source de distraction pour l’opposition officielle, au risque de négliger son rôle de critique des actions du gouvernement.

La nouvelle mouture de l’Assemblée nationale sera aussi plus féminine que jamais, avec 57 élues sur 125, soit 45 % du total.

Avec le départ de Dominique Anglade, il y aura déjà un siège vacant dès le 1er décembre, Saint-Henri-Sainte-Anne, ce qui devra entraîner la tenue d’une élection complémentaire d’ici le printemps.