La toponymie est d’une importance capitale pour la mémoire d’un peuple
Un Café historique tenu récemment au centre culturel Marie-Fitzbach de Saint-Georges a pu mettre en lumière l’importance de la toponymie pour préserver nos racines et notre patrimoine.
La rencontre animée par Pier Dutil a permis à Daniel Lessard, président de la Société historique Beauce-Sartigan de dresser un portrait de 35 lieux et espaces désignés en l’honneur de bâtisseurs et de pionniers de la région. «En plus de permettre aux gens de se guider dans une ville, la toponymie permet de souligner les efforts particuliers d’individus qui ont développé la région ou sont venus en aide aux gens. C’est notre devoir de mémoire», souligne M. Lessard.
Cependant, plusieurs pratiques du passé ne sont plus autorisées ni recommandées, a tenu à souligner l’autre conférencier, le greffier de la Ville de Saint-Georges et responsable de la toponymie, Jean McCollough.
D’ailleurs, les boulevards Dionne et Lacroix ont été désignés en l’honneur des réputés hommes d’affaires et politiciens locaux, Ludger Dionne et Édouard Lacroix alors qu’ils étaient toujours vivants. «Ce n’est plus possible aujourd’hui, parce que les personnes doivent être décédés depuis au moins un an», précise M. McCollough soulignant que cela évite aussi des tracas, si le personnage devient moins honorable avant son décès…
Dans le secteur ouest, il s’est produit la même chose avec la désignation du parc Lacasse, près du pont David-Roy, et du parc Pomerleau, près de 32e Rue. Contrairement à ces deux boulevards, le nom de ces parcs n’ont pas été soumis à la Commission de toponymie du Québec puisque l’ex-maire, Paul-Henri Lacasse et de l’homme d’affaires, Hervé Pomerleau, parce qu’ils sont vivants. Saint-Georges suit les règles imposées par la Commission et inspirées par l’Organisation des Nations Unies.
Une injustice pour Clermont Pépin
La 1re Avenue Clermont-Pépin, en l’honneur du compositeur de renom international ayant vécu sur cette artère, n’a jamais pu être officialisée à la Commission de toponymie du Québec pour des raisons administratives. «La Commission refusait que nous ayons le numéro et le nom. La Ville a décidé de ne pas l’entériner pour éviter des changements d’adresse aux citoyens», conclut le greffier.
Recherches cruciales
La Société historique Beauce-Sartigan, de son côté, tente de protéger et de valoriser le patrimoine avec des moyens limités et des bénévoles dévoués. En ce sens, la Société cherche à comprendre à recoller les morceaux sur le passé de la région, dont celui de la pente douce. Cette pente dans la 130e Rue qui relie la 2e Avenue à la 1re Avenue n’a rien de douce, soit dit en passant.
Selon les recherches préliminaires de la Société, l’oncle de l’auteur Roger Lemelin demeurait dans cette pente. Cet auteur a écrit la série Les plouffe et l’oeuvre La pente douce. L’autre croyance est que la pente aurait dû être plus douce, mais les coûts d’expropriation d’une maison en direction sud ont changé la donne.
«Pour cela, nous avons besoin de l’aide de la population, des documents ou de l’argent bien évidemment. Le patrimoine est important. Nous trouvons qu’il se fait trop détruire à Saint-Georges dernièrement. Nous allons peut-être devoir intervenir», lance Anne Dutil, ex-présidente de la Société.
Le pont de bois et la «briquade» de David Roy
Le pont David-Roy a été désigné en l’honneur de cet homme d’affaires natif de Saint-François de Beauceville ayant érigé le premier pont à Saint-Georges. En 1881, Roy avait obtenu du gouvernement un permis de 30 ans pour exploiter ce pont couvert en bois à péage. L’autorisation a fait l’objet de nombreux démêlés judiciaires jusqu’en Cour Suprême. «Il s’est rendu en Angleterre pour obtenir gain de cause. C’est pourquoi Saint-Georges a pu construire un pont de fer qu’en 1912», explique le président de la Société historique Sartigan, Daniel Lessard.
Fait intéressant, l’industriel a aussi fondé la briqueterie appelée «briquade». Cette entreprise a produit les briques de construction de nombreuses résidences du 19e et 20e siècle dernier de Saint-Georges et des environs. Un parc de la 35e Rue pour enfants porte le nom de cette entreprise de la 1re Avenue Ouest. M. Roy a aussi été le maire de la première paroisse d’Aubert-Gallion en 1895. Et 118 ans plus tard, son arrière-petit-fils, Claude Morin, devenait le maire de Saint-Georges.
Qui est l’homme derrière le tournoi et le Pavillon Comrie?
Édouard Lacroix de la St. George Woollen Mills, une entreprise de lainage à paletots, a embauché le teinturier écossais, Thomas Comrie en 1936. Ce philanthrope qui n’a jamais appris le français a légué à son décès ses biens à la ville au bénéfice des jeunes, du mouvement scout et des sports. Le pavillon Comrie situé au côté du centre sportif Lacroix-Dutil et le plus vieux tournoi de hockey en Amérique du Nord portent donc son nom en raison de son implication communautaire et sportive.
Fait cocasse, Comrie a eu sa chambre à l’Hôtel National et il a déjà eu comme voisin un animateur de radio un peu bruyant du nom de Gilles Bernier qui est devenu par la suite député fédéral de Beauce.
Connaissez-vous la Marie Tomiche?
Bien peu de gens savent que la pente de la 114e Rue liant la 2e Avenue à la 1re Avenue près de l’édifice Canam-Manac se nomme la côte à la Marie-Tomiche. Elle est désignée en mémoire de Marie Poulin dit Tomiche qui était propriétaire d’une résidence de la 1re Avenue. Aujourd’hui démolie, cette demeure était l’ancienne version de la fameuse maison blanche au Saguenay. Cette dernière a résisté non seulement à la pire débâcle que Saint-Georges ait connue en 1896, mais aussi à au violent incendie de 1915 ayant ravagé 50 maisons du secteur.
Notons qu’un restaurant du même nom se trouvait à Place Centre-ville. L’établissement a fermé ses portes en 2006 ce qui a permis l’agrandissement du Dollarama.