Les producteurs demandent la fin de l’importation du lait diafiltré

Lassée de se battre contre une concurrence jugée déloyale, la filière Chaudière-Appalaches-Sud des Producteurs de lait du Québec demande que le Canada n’accepte plus la présence de lait diafiltré importé sur son territoire.

Renaud Lachance est producteur laitier à Saint-Évariste. Sa ferme de 225 vaches produit 7500 litres de lait par jour. Il confirme que la concurrence extérieure du lait diafiltré cause des pertes financières importantes à son entreprise.

«C’est environ 3 $ payé de moins par hectolitre par les multinationales pour des pertes de 70 000 $ par année. À cause de ça, j’ai dû refinancer certains prêts et remettre des projets à plus tard», mentionne-t-il.

Celui-ci ajoute que le concept de gestion de l’offre existe justement pour éviter les fluctuations du prix du lait. «On ne devrait pas importer ce qu’on est capable de produire chez nous. Contrôler les importations, c’est la <I>job<I> du gouvernement», pense-t-il.

Copropriétaire de la Fromagerie la Pépite d’Or à Saint-Georges, Bertrand Boutin confirme que tous les fromages de l’entreprise sont conçus à 100 % de lait pur beauceron.

«On le sait qu’on n’est pas compétitif pour battre les multinationales, mais notre philosophie est d’offrir un produit authentique. La traçabilité des ingrédients est primordiale. Les États-Unis n’ont pas les mêmes normes de qualité», croit ce dernier.

«Si elle n’est pas colmatée, cette brèche menacera la pérennité de notre politique laitière», d’ajouter Bruno Cyr, président de la filiale Chaudière-Appalaches-Sud.

Filtration et tarifs

Le concept du lait diafiltré utilise l’ultrafiltration du lait écrémé où sont seulement conservées la protéine et l’eau. Le résultat simplifie la fabrication des produits laitiers qui n’ont pas à être réhydratés.

L’arrivée des produits laitiers au Canada est limitée par des tarifs douaniers, un contrôle en lien avec la gestion de l’offre. Or, des ingrédients laitiers entrent au pays en utilisant des failles du classement tarifaire pour contourner les limites d’importation.

Le lait diafiltré est aussi considéré comme ingrédient laitier par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), mais comme du lait pur par l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA).

Ainsi, les multinationales du lait peuvent ajouter du lait diafiltré importé sans aucune limite dans la fabrication des fromages. Cette problématique contournerait une réglementation datant de 2007 où Ottawa avait mis en place des normes de composition des fromages limitant l’ajout d’ingrédients laitiers pour compléter la fabrication.