Reconstruire le visage des défunts pour faciliter le deuil

Un Georgien de 36 ans est l’un des deux seuls thanatologues au Canada à proposer de reconstruire les visages de défunts qui sont trop détériorés pour être exposés au salon funéraire.

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Le service qu’offre Pierre-Maxime Fugère permet de mieux vivre son deuil. Selon lui, il existe un effet thérapeutique à revoir un être cher qui est décédé soudainement. «L’annonce du décès provoque le choc, première étape du deuil, mais aussi le déni, qui est la deuxième étape, puisque personne ne veut croire une telle nouvelle. Afin de confirmer à l’esprit que la personne est bien décédée et qu’il n’y a plus aucun doute que c’est bien elle, il faut le voir pour le croire. C’est à ce moment que nous intervenons afin d’apporter cette confirmation très cruelle», explique-t-il.

«Sans confirmation, le déni persistant peut venir chambouler l’état psychologique d’une personne et même en venir à développer la maladie chez certains», poursuit-il.

Des notions de maths et d’art

Pour y arriver, Pierre-Maxime Fugère utilise des photos de la personne décédée. Il établit un ratio entre une même partie visible sur le corps et les clichés, par exemple un œil, pour ensuite déterminer les dimensions des autres organes, traits, sillons, éminences et saillies de la figure. «J’utilise toujours tout ce que j’ai à ma disposition pour reconstruire le visage de la personne décédée», mentionne-t-il.

Il donne en exemple un cas de mort par arme à feu. «Je vais utiliser les lacérations produites lors de l’implosion de la boîte crânienne afin d’avoir accès aux os crâniens qui seront en plusieurs morceaux. Je vais les remettre en place et les fixer au bon endroit comme un casse-tête puisque les os cassent, mais ne changent jamais de forme». Dans les cas où certains os sont pulvérisés, il utilise de la plasticine de sculpteur et s’assure de la symétrie à l’aide d’un compas.

Le thanatologue recolle ensuite les chaires et utilise de la cire et du maquillage cinématographique pour camoufler le tout. Il peut également recréer la pilosité, que ce soit pour la barbe, les cils, les sourcils ou les cheveux.

Selon le Beauceron, il est toujours possible de reconstruire le visage d’un défunt dans la mesure où le crâne est retrouvé, puisque les mesures anthropométriques médico-légales permettent de déterminer l’épaisseur de la chaire et des muscles. «Dans la mesure où j’ai des photos et une mesure, il est possible de faire quelque chose. Tout est possible quand on a du temps», indique M. Fugère.

Une entreprise spécialisée

Son entreprise, Services PMFX, est basée à Montréal. Les salons funéraires font appel à ses services lorsqu’ils ne se sentent pas capables de reconstruire le visage d’un défunt ou lorsqu’ils manquent de temps pour le faire. «Nous sommes deux au Canada avec cette spécialité qui ne sont pas attachés à une entreprise», précise-t-il, ajoutant avoir appris la chirurgie reconstructive dans une académie aux États-Unis.

Puis, il a développé ses propres techniques avec son mentor, André Fournier, d’Amqui, et Mario Soucy, du studio MSFX, spécialisé entre autres dans le maquillage d’effets spéciaux.

M. Fugère est également conférencier formateur pour différentes associations, tant au Canada qu’aux États-Unis et en Europe. Il côtoie ainsi les grands spécialistes du métier du monde, ce qui lui permet également d’approfondir ses connaissances.

*La dernière image de la galerie photo représente une réplique réaliste faite en silicone d’un visage défiguré. Il s’agit d’un outil pédagogique qu’utilisent les Services PMFX.