Survivre à un deuil périnatal sans oublier ce petit être humain

Sœurs jumelles, Stéphanie et Johanie Toulouse sont tombées enceintes en décembre 2015. Ce qui devait être un bonheur collectif s’est transformé en une triste situation pour Stéphanie.

«C’était ma première grossesse et Johanie avait déjà deux enfants. On avait seulement trois jours de différence, nos accouchements étant prévus les 3 et 6 septembre 2016», dit Stéphanie.

Si la grossesse et l’accouchement de Johanie se sont bien déroulés, Stéphanie vivait beaucoup de stress et des symptômes inhabituels après dix semaines à porter son bébé.

«J’avais des saignements durant la nuit. Les médecins ont trouvé un hématome (amas de sang) dans mon ventre. On m’a mis au repos, mais l’hématome s’est résorbé à la 20e semaine», explique-t-elle.

Apprenant à l’échographie qu’elle attendait un garçon, Stéphanie a aussi su que le bébé était anormalement petit et qu’un suivi médical serait nécessaire jusqu’à la fin de la grossesse.

«À la 30e semaine, j’ai rencontré le généticien du CHUL pour étudier mes antécédents familiaux et faire une amniocentèse afin de connaître les causes du retard de croissance», précise Stéphanie Toulouse.

Johanie et Stéphanie n’avaient qu’un écart de trois jours entre leurs grossesses.

Choix bouleversant

Le 15 juillet 2016, Stéphanie et son conjoint apprennent que Charles-Édouard (nom du bébé) souffre notamment du syndrome de Wolf-Hirschhorn. Cette maladie cause un retard de croissance et mental, la plupart des enfants étant incapables de marcher et parler pour le reste de leur vie.

«C’est un enfant sur 50 000 qui est frappé par cette maladie. Même si l’espérance de vie était bonne, nous ne voulions pas hypothéquer notre vie et la sienne. Interrompre la grossesse a été la plus grande décision à prendre de notre vie», confirme Stéphanie.

Un comité d’éthique a donné son accord pour cesser la grossesse rendue à son troisième trimestre. Le cœur de Charles-Édouard a cessé de battre le 21 juillet 2016 à 11h59. Stéphanie Toulouse a donné naissance au bébé le lendemain matin à 10h35.

Lavé et habillé par Stéphanie, Charles-Édouard a été immortalisé en images par un membre de Portraits d’Étincelles. Cette fondation accompagne les parents vivant un deuil périnatal en leur offrant gratuitement des photographies professionnelles de l’enfant.

«Des gens trouvent ça morbide, mais on garde un souvenir de lui et ça nous aide dans le processus de deuil», dit Stéphanie.

Pour apaiser sa peine, Stéphanie Toulouse avait participé à la Fête des anges en 2016 avec Johanie et sa mère.

Fête des anges et nouveau bébé

Avec sa soeur et sa mère, Stéphanie Toulouse a participé à la Fête des anges de Saint-Georges trois mois après sa grossesse interrompue. L’événement rend hommage aux enfants disparus dans le deuil périnatal.

Johanie a accouché d’Emma le 5 septembre 2016. «Je me sentais coupable qu’on n’ait pas vécu notre grossesse de la même façon. Je me demandais pourquoi c’était arrivé à elle et pas à moi», se rappelle-t-elle.

La bonne nouvelle est que Stéphanie est enceinte à nouveau, son accouchement étant prévu le 11 décembre prochain. Cette fois, il s’agira d’une fille en pleine santé.

Charles-Édouard ne sera jamais oublié. Son corps est enterré dans une section spéciale du cimetière Saint-Charles à Québec où se retrouvent d’autres bébés décédés en processus de grossesse. Stéphanie et Johanie étaient également présentes à la Fête des anges le 14 octobre dernier.

«Il y a des objets dans notre maison pour se souvenir de Charles-Édouard. Je serai à l’aise d’en parler à ma fille lorsque le moment sera venu», conclut Stéphanie.

Johanie pose avec Emma, 14 mois, alors que Stéphanie accouchera en décembre prochain.