Des délais plus longs en Beauce

JEUNESSE. La Direction de la Protection de la jeunesse en Chaudière-Appalaches (DPJ) continue de composer avec de longs délais dans ses dossiers en attente d’une évaluation. Dans plusieurs cas, ce sont les délais observés dans certains palais de justice qui sont en cause, explique la directrice générale de l’organisation, Caroline Brown.

Cette dernière a récemment livré son constat devant les membres du conseil d’administration de l’établissement. Depuis avril 2023, la DPJ a reçu 2 % de plus de signalements qu’à pareille date l’an dernier (5134 cas) et une hausse de 25 % des signalements ayant été retenus (1933), ce qui explique le nombre de dossiers en attente.

Mme Brown a indiqué qu’au début du mois de décembre, 250 dossiers étaient en attente d’évaluation en Chaudière-Appalaches, alors qu’une situation jugée normale se situe autour de 64. Malgré tout, elle observe une tendance à la baisse à ce chapitre. « Nous ne sommes pas en contrôle du tout et sommes très loin de la cible. Malgré cela, il y a au moins une tendance vers une diminution. Les délais moyens sont de 42 jours, alors que le ministère de la Santé et des Services sociaux souhaite davantage une situation avoisinant les 25 jours au maximum. Il s’agit tout de même d’une certaine amélioration, puisqu’en juin, les délais moyens étaient de 60 jours », a-t-elle résumé.

Elle ajoute toutefois que toutes les situations qui nécessitent une intervention dans la journée ou les 24 heures sont toutefois traitées dans les délais. « Ce sont les dossiers moins urgents qui sont repoussés. Lorsque des dossiers issus de la liste d’attente sont pris en charge, ce sont naturellement ceux dont la date des premiers contacts est la plus ancienne qui sont priorisés. »

Elle note toutefois certaines situations plus délicates. « En matière d’application des mesures, 60 dossiers sont en attente et 54 n’ont toujours pas d’intervenants d’assigné. S’il n’y a pas d’intervenant social d’assigné à un dossier, c’est préoccupant, car le bilan sécurité et développement de plusieurs a été considéré comme compromis lors de l’évaluation. Notre délai moyen est heureusement sous la moyenne souhaitée par le ministère. »

Différents enjeux

Selon Mme Brown, les délais judiciaires sont une des raisons qui expliquent le nombre élevé de dossiers en attente, particulièrement dans les districts judiciaires de Québec et de la Beauce, où ils sont de six mois ou plus. « On sait dans certains cas que la situation de certains enfants est compromise, sauf que nous ne serons pas entendus avant le mois de juin prochain. Dans la Beauce, les rôles sont chargés, tandis que dans Les Appalaches et le secteur de Montmagny-L’Islet, il y a moins de volume, alors le délai est moins long ».

Manque de juges à la Cour du Québec, manque de salles dans certains palais de justice, manque de greffiers ou de constables dans certains cas, sont toutes des choses pouvant expliquer ces retards. « Le domaine de la justice est aussi aux prises avec le manque de main-d’œuvre. Comme en santé, ce sont souvent des équipes qui siègent et font avancer les dossiers. S’il manque un membre à une équipe, elle ne peut travailler. »

Elle ajoute qu’au palais de justice de Québec, les causes des enfants ne seront pas entendues avant juin, ce qui est énorme, à son avis. « Dans les Appalaches, nous sommes davantage autour de trois mois, c’est beaucoup mieux, même si c’est énorme. Tout cela a un impact énorme sur les enfants et leurs parents, avec tout le stress et l’anxiété que cela implique. On peut passer en mesure d’urgence ou provisoire, et être entendu en urgence au palais de justice, sauf que lorsqu’il n’y a pas de motifs d’agir ainsi, on doit attendre très longtemps. Comme ces dossiers demeurent à l’évaluation, cela limite beaucoup notre capacité de les attribuer. »

Autre fait encourageant, le taux de judiciarisation des dossiers est passé de 49 % à 35 % en deux ans, la médiation jouant un rôle primordial dans ces résultats. « 70 % de nos dossiers judiciarisés se terminent en projet d’entente. Les avocats réussissent généralement à avoir un plan de protection qui respecte les règles et qui fait consensus, ce qui contribue à réduire les délais », précise-t-elle.

Un projet-pilote de médiation a récemment été mis en place par le ministère de la Justice. Une vingtaine de propositions ont aussi été mises sur la table et servent de base à cette médiation et certaines d’entre elles servent à la diminution des journées d’audience nécessaires à traiter les dossiers, notamment lors d’une séparation.

Les approches consensuelles, comme les appelle Mme Brown, permettent heureusement certains résultats positifs. « Notre personnel est formé à la médiation et en allant chercher l’adhésion des gens, on peut établir un climat de confiance qui permet d’éviter le tribunal, la majorité du temps. »

Cela dit, Mme Brown précise que cette baisse pourrait être attribuable à la grève dans les écoles et que le retour des fêtes pourrait bouleverser cette tendance. « Un peu comme lors de la pandémie, le téléphone sonne moins. On verra avec le retour des fêtes, ce qui pourrait se passer. »