L’hymne à la vie d’une mère

Un des aspects difficiles de l’Alzheimer, c’est de voir disparaître des traits de la personnalité de la personne atteinte. Mais qu’en est-il de la spiritualité et des valeurs qui ont guidé cette personne durant toute sa vie ?

Pour l’objet de cet article, je dépose mon chapeau de représentante du journal pour parler à nouveau à titre de la fille de ma mère la première fois que j’ai témoigné de ma relation avec ma mère et la maladie fut en janvier 2023, mois dédié à l’Alzheimer. En tant qu’aidante naturelle, le plus dur est de voir les repères de sa vie comme femme, en tant qu’épouse et mère, disparaître et laisser place, pour elle, à de vagues souvenirs. Toutefois, elle possède encore de courts moments de lucidité. Même si elle semble perdue la plupart du temps, ses sentiments et ses émotions demeurent très présents, même s’il me faut lire entre les lignes les quelques mots qu’elle va me murmurer.

Depuis le diagnostic, l’aspect que j’appréhendais le plus en tant que sa fille, ce sont les moments où en la regardant droit dans les yeux, je saurais que ma mère ne me reconnaîtra plus. J’ai déjà vécu plusieurs de ces moments. Après avoir laissé couler de nombreuses larmes sur mes joues, je me suis assise auprès d’elle et je lui ai dit que quoi qu’il arrive, je serai avec elle jusqu’à la fin pour la stimuler, la faire rire et sourire, et bien entendu, la réconforter. Même lorsqu’elle s’endort devant moi, elle lève souvent la tête pour s’assurer que je suis toujours présente à elle.

Ma mère a toujours été une femme de grande foi, pieuse et contemplative. Elle et mon père ont élevé leurs enfants dans la tradition catholique. En ce temps de Pâques, je lui ai demandé qui était Dieu pour elle : « Il est spécial. Je le prie, mais ce n’est pas toujours facile. Des fois, il est loin », me souffla-t-elle en me regardant dans les yeux et laissant place au silence, ne trouvant pas d’autres mots. Je l’ai informée que Pâques arrivera dans quelques jours et elle s’est mise à chanter ce chant catholique Il est là au cœur de nos vies

Avant le diagnostic d’Alzheimer, ma mère a combattu courageusement le cancer du sein. Après chaque traitement de radio-oncologie, elle allait s’asseoir pour prier à la chapelle de l’Hôtel-Dieu à Québec. Si elle en avait la force, elle assistait quotidiennement à la messe, à l’église de Saint-Georges. J’admire sa foi, son combat à essayer de se souvenir ne serait-ce que des noms de ses petits et arrière-petits-enfants. Lorsque je la vois la tête baissée et les mains croisées sur sa poitrine, je n’ai aucun doute, elle prie en silence…

Malgré les nombreux soins dont elle a besoin, un de mes frères m’a fait la grande surprise de l’amener à mon mariage.