Aide humanitaire canadienne de 71 millions $ dans la région du Soudan

OTTAWA — Le ministre canadien du Développement international, Harjit Sajjan, annonce une aide humanitaire de 71 millions $ pour le Soudan et deux pays voisins qui font face à un afflux de réfugiés à la suite des graves violences dans ce pays.

Les pays de l’est de l’Afrique font face à d’énormes flux migratoires de personnes qui fuient l’escalade dévastatrice de violences qui a commencé au Soudan le 15 avril. 

«Les défis sont immenses et ils ne doivent pas être relevés seuls, a déclaré M. Sajjan aux journalistes, mercredi, sur la colline du Parlement. La situation se détériore et le peuple soudanais a toujours besoin de notre aide.»

Le ministre a précisé que l’aide financière transitera par des agences des Nations unies, par la Croix-Rouge et par des organisations non gouvernementales, afin de fournir dans la région de la nourriture, de l’eau, des services d’assainissement et d’hygiène ainsi que des services de santé de base.

Près de 31 millions $ iront au Soudan proprement dit et à peu près le même montant sera envoyé au Soudan du Sud, qui a fait sécession en 2011.

Le Canada enverra également 10 millions $ à la République centrafricaine, au sud-ouest des deux autres pays. Ces fonds seront versés à une quinzaine d’organismes et d’agences, allant du Programme alimentaire mondial à Médecins sans frontières.

Le ministre Sajjan a précisé mercredi qu’Ottawa avait mis de côté ce financement pour la région avant le début du conflit, mais qu’il accélérerait désormais la livraison de ces sommes pour aider les personnes qui fuient les violences au Soudan.

Il a ajouté que le Canada promettrait plus d’argent après sa visite dans la région, probablement à la fin de ce mois, pour les assemblées générales de la Banque africaine de développement en Égypte. M. Sajjan a aussi indiqué qu’il espérait se rendre au Tchad et s’entretenir avec des responsables de l’Union africaine, basée en Éthiopie.

À ce moment-là, a-t-il dit, on devrait savoir plus clairement quels pays ont fini par accueillir des personnes déplacées, qui errent actuellement pour essayer de trouver un semblant de sécurité.

«Une fois que nous aurons cette évaluation et que l’ONU présentera ses demandes, nous fournirons des fonds supplémentaires», a-t-il déclaré.

M. Sajjan a aussi précisé que le financement annoncé mercredi était structuré de manière flexible, afin que les différents organismes puissent étendre les programmes existants pour faire face à l’afflux de réfugiés.

La ministre de la Défense, Anita Anand, a par ailleurs déclaré mercredi que le Canada avait renoncé à utiliser un aéroport militaire à Khartoum pour des vols d’évacuation, en raison de problèmes de logistique et de sécurité. Au lieu de cela, l’armée se concentre sur l’aide aux personnes qui font le périlleux voyage terrestre vers la côte soudanaise, sur la mer Rouge.

«Nous avons encore deux navires au large des côtes du Soudan et nous travaillons en étroite collaboration avec Affaires mondiales Canada et avec nos alliés pour assurer la sûreté et la sécurité de tous les Canadiens», a-t-elle déclaré aux journalistes.

Sauf-conduits demandés

Une lutte pour le contrôle du Soudan a éclaté après des mois d’escalade des tensions entre l’armée nationale et un groupe paramilitaire rival, appelé les Forces de soutien rapide. La capitale, Khartoum, est devenue une véritable zone de guerre et les pays occidentaux ont décidé d’évacuer leurs ressortissants.

Le secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires de l’ONU, et Coordonnateur des secours d’urgence, Martin Griffiths, est arrivé mercredi au Soudan, affirmant qu’il cherchait des garanties auprès des belligérants pour le passage en toute sécurité de l’aide humanitaire. Il a pris acte des critiques selon lesquelles l’ONU avait été lente à réagir, ses agences affirmant qu’elles disposaient de peu de moyens et d’un personnel limité.

Avant même que les combats n’éclatent le mois dernier, le Soudan était un pays où un tiers de la population dépendait de l’aide humanitaire.

Les deux parties avaient conclu un nouveau cessez-le-feu, qui doit expirer jeudi, mais comme les accords précédents, il n’a pas réellement mis fin à tous les combats.

M. Sajjan s’est dit troublé par la rapidité avec laquelle le conflit s’est déroulé, après le travail du Canada avec des alliés pour tenter de ramener la paix dans la région ces dernières années. Il a déclaré que d’importants flux de personnes désespérées entraînent non seulement la faim et la souffrance, mais également une instabilité politique qui peut créer davantage de crises.

Il a noté que l’ONU recevait déjà une fraction du financement dont elle aurait besoin pour héberger en toute sécurité les réfugiés, l’organisation ayant déclaré cette semaine qu’elle ne disposait que de 15 % de l’argent dont elle avait besoin pour soutenir les personnes déplacées au Tchad. «Le Canada lève la main pour faire sa part», a insisté M. Sajjan.

Le conflit a jusqu’ici fait 550 morts, dont des civils, et plus de 4900 blessés. Les combats ont déplacé au moins 334 000 personnes à l’intérieur du Soudan et en ont envoyé des dizaines de milliers d’autres dans les pays voisins – l’Égypte, le Tchad, le Soudan du Sud, la République centrafricaine et l’Éthiopie, selon les agences de l’ONU.

La secrétaire parlementaire du ministre Sajjan, Anita Vandenbeld, a rappelé que les travailleurs humanitaires financés par le Canada n’aident pas seulement les gens: ils fournissent également des informations clés sur la meilleure façon pour Ottawa de réagir. Elle a souligné que trois employés du Programme alimentaire mondial avaient été tués le mois dernier au Darfour.

«Ce sont les travailleurs humanitaires qui sont les derniers à sortir et les premiers à revenir. Ils se placent en première ligne parce qu’ils se soucient profondément, et ils ont de solides connaissances et des partenariats sur le terrain», a-t-elle déclaré.

Mme Vandenbeld et ses collègues ont aussi souligné que les femmes seront essentielles pour trouver une résolution durable à la crise au Soudan, par exemple grâce à celles que le Canada a formées pour agir en tant que négociatrices de paix.

«Nous ne pouvons pas simplement considérer les femmes comme des victimes. Nous devons les considérer comme des leaders et les solutions qui viennent des organisations de femmes qui sont très fortes dans la région.»