Chaleur: la climatisation est essentielle pour les aînés, rappelle une étude

MONTRÉAL — Un accès à la climatisation est crucial pour les aînés en période de grande chaleur, confirment des travaux menés à l’Université d’Ottawa, notamment parce que leur capacité à réguler leur chaleur corporelle est réduite et parce qu’ils prennent plus de temps que les autres à ressentir les effets néfastes de la chaleur.

Ces résultats sont publiés au moment où des records de chaleur sont fracassés à travers le monde, de l’Antarctique jusqu’à l’Europe en passant par l’Amérique du Nord, et au moment où la NASA prévient que l’année 2023 semble en voie d’être la plus chaude jamais mesurée.

Lors de la canicule de 2021 dans l’Ouest canadien, a rappelé l’auteur de l’étude, le professeur Glen Kenny, ce sont 119 aînés qui ont perdu la vie et la vaste majorité d’entre eux se trouvaient dans leur maison.

«La température était élevée, elles n’avaient pas accès à l’air climatisé ou bien c’étaient des personnes qui étaient seules, sans le support d’une personne de la famille ou de quelqu’un qui pourrait les aider», a souligné le chercheur, qui est titulaire de la chaire de recherche de l’Université d’Ottawa en physiologie environnementale.

Le professeur Kenny et ses collègues ont soumis 40 adultes âgés de 64 à 79 ans à une simulation de canicule de neuf heures à 37 degrés Celsius, avant de les diviser en deux groupes: le premier a pu se reposer pendant deux heures dans une pièce climatisée, mais pas l’autre.

Les chercheurs ont tout d’abord constaté que le refroidissement réduisait l’effort demandé au système cardiorespiratoire.

Pendant la période d’exposition à la chaleur, a dit M. Kenny, les aînés auront une capacité réduite à maintenir leur pression artérielle à un niveau acceptable. Ils seront donc à risque de chutes et de blessures si jamais leur pression artérielle tombe subitement quand ils changent de position, par exemple en se levant.

Les chercheurs ont pu déterminer qu’une température intérieure de 26 degrés Celsius serait sécuritaire, parce que cela va diminuer le niveau de stress thermique que l’aîné va ressentir pendant la journée, a expliqué M. Kenny, qui est aussi professeur titulaire à l’École des sciences de l’activité physique à la Faculté des sciences de la santé.

«C’est le fait que la température se maintient à un niveau élevé pour une période prolongée qui crée un stress physiologique sur la personne», a-t-il dit.

Lorsqu’ils ont comparé la réponse physiologique de jeunes adultes (âgés de 19 à 31 ans) et d’adultes plus âgés (âgés de 61 à 78 ans) après neuf heures de repos à une température de 40 degrés Celsius, le professeur Kenny et son équipe ont constaté que les adultes plus âgés subissaient des augmentations plus importantes du stockage de la chaleur et de la température centrale par rapport aux jeunes adultes.

En d’autres mots, les aînés peinaient plus que les jeunes à réguler leur chaleur corporelle.

«Ils ont une capacité de perte de chaleur qui est déjà diminuée à cause de l’âge, et certainement que c’est encore plus intense pour des personnes qui ont des maladies chroniques», a expliqué M. Kenny. 

Les personnes âgées verraient s’évaporer environ 5 % de leur capacité de perte de chaleur par décennie, et cette capacité est inférieure chez les femmes par rapport aux hommes. Cela est notamment attribuable à une sudation réduite.

Il ne faut pas non plus perdre de vue que les personnes âgées sont moins sensibles à la chaleur que les plus jeunes, a ajouté le chercheur: elles ne ressentent tout simplement pas la chaleur de la même manière que les autres.

«Elles vont réagir très lentement à une hausse de température corporelle, a-t-il rappelé. C’est vraiment vers la septième, la huitième ou la neuvième heure dans la chaleur qu’elles vont commencer à se sentir mal, mais rendues là, c’est un peu tard parce qu’elles peuvent déjà commencer à présenter des changements physiologiques qui peuvent causer des problèmes.»

La climatisation est vraiment la seule façon de les protéger, a dit le professeur Kenny. Une personne âgée qui se retrouve chez elle en période de grande chaleur, sans source de refroidissement, doit être extirpée de son domicile, prévient-il. 

Un temps humide qui nuit à l’évaporation efficace de la chaleur et des nuits inconfortables en raison de la chaleur pourront venir amplifier le problème, a-t-il dit, une situation qu’il compare à celle d’un voisin qui ferait jouer de la musique à tue-tête 24 heures par jour, sept jours par semaine.

«(La chaleur) va causer un stress qui, éventuellement, va diminuer la capacité physiologique à réagir à ce stress», a résumé le chercheur.

Les abris où ceux qui en ont besoin peuvent aller se rafraîchir ont un rôle à jouer, a dit M. Kenny, mais la température corporelle recommence rapidement à grimper après le retour à la maison. Même l’utilisation de ventilateurs ne réussira pas à régler le problème, a-t-il souligné.

Les conclusions des travaux du professeur Kenny ont été publiées par Environmental Health Perspectives et par le Journal of Applied Physiology.