Il ne suffit pas de nommer un «cabinet inclusif» pour plaire aux communautés racisées

OTTAWA — Une chercheuse intéressée par la diversité en politique affirme que la décision de Justin Trudeau d’être plus inclusif lors de son remaniement ministériel le mois dernier n’aura pas beaucoup d’impact sur l’électorat si cette initiative ne va pas au-delà de la simple image.

Le premier ministre Trudeau a ajouté sept nouveaux visages à son cabinet, le 26 juillet, dont la première femme canado-philippine, Rechie Valdez, et le premier Tamoul sri-lankais, Gary Anandasangaree, à faire partie du «Saint des saints».

Le premier ministre soutenait alors que ce nouveau cabinet reflétait la diversité du Canada et apportait des voix, des compétences et des expériences nouvelles autour de la table ministérielle.

Mais plusieurs ont vu ces nominations comme une tentative libérale pour s’assurer des voix dans des «comtés serrés» et auprès de certaines communautés culturelles bien ciblées.

Or, Erin Tolley, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur le genre, la race et les politiques inclusives, à l’Université Carleton d’Ottawa, estime qu’un siège à la table ministérielle ne signifie pas nécessairement une véritable représentation au sein du gouvernement — que ce soit pour les ministres ou pour les électeurs.

«Je pense que dans ces cas particuliers, nommer quelqu’un de ces communautés envoie le signal que les libéraux sont à l’écoute, qu’ils apprécient la contribution de cette communauté», a admis Mme Tolley.

Mais en même temps, il est réducteur de parler des changements au cabinet en termes d’appartenance ethnique, estime la chercheuse. Selon elle, on rend un bien mauvais service aux communautés de la diaspora et aux ministres eux-mêmes en se concentrant uniquement sur l’origine ethnique plutôt que sur les politiques publiques, car cela suppose que les communautés de la diaspora votent principalement sur la base de l’origine ethnique des candidats.

Or, il y a peu de preuves suggérant que les électeurs peuvent être motivés uniquement par ces motifs ethniques, soutient Mme Tolley. Ce qui signifie qu’un cabinet plus diversifié n’est pas susceptible de modifier radicalement le comportement des électeurs que ces ministres représentent.

«Vous ne pouvez pas seulement mettre de la diversité autour d’une table: il faut aussi changer la façon dont vous faites de la politique et modifier vos choix politiques», croit Mme Tolley.

Sinon, les communautés culturelles pourraient changer de camp si elles sentent que leur appui est instrumentalisé et si elles ne constatent pas d’impact réel sur les décisions d’un gouvernement.