L’Alberta veut décentraliser son système de santé après 15 ans de centralisation

EDMONTON — La nouvelle ministre de la Santé de l’Alberta a reçu le feu vert pour décentraliser l’ensemble du système de prestation des soins de santé, 15 ans après que la province a achevé un processus pluriannuel en plusieurs étapes pour le centraliser.

Dans une lettre de mandat publiée mardi, la première ministre Danielle Smith a demandé à la ministre de la Santé Adriana LaGrange de réformer la gestion et la structure des services de santé de l’Alberta afin d’étendre la prise de décision pour améliorer les soins de première ligne.

«Nous devons favoriser un environnement au sein de l’AHS (Alberta Health System) et de l’ensemble de la communauté de la santé qui accueille l’innovation et encourage les meilleurs soins aux patients», a écrit la première ministre conservatrice unie.

S’exprimant dans une entrevue à la radio sur QR Calgary, Mme LaGrange a indiqué que les réformes prévues restent encore à être déterminées.

«Je vois certains défis et certaines lacunes qui ont été créés au fil du temps, au fil des décennies», a-t-elle nuancé.

 «Tout cela impliquera des structures, et il est trop tôt pour dire à quoi elles ressembleront. Je ne veux pas présupposer où nous irons, mais rassurez-vous, nous allons apporter des changements, car évidemment le statu quo ne fonctionne pas», a-t-elle ensuite précisé.

La décision met en branle un renversement de la politique gouvernementale qui a commencé il y a près de 30 ans lorsque le premier ministre de l’époque, Ralph Klein, a dissous plus de 200 conseils et agences de santé en 17 régies régionales de la santé.

Celles-ci ont ensuite été regroupées en neuf conseils, puis, en 2008, dans l’AHS autonome actuel.

Pendant la pandémie de COVID-19, le premier ministre de l’époque, Jason Kenney, avait déclaré que la structure de gestion unifiée permettait à l’Alberta d’obtenir un accès plus rapide et de meilleurs prix pour les fournitures en demande.

«Nous pourrions organiser un spectacle politique ici et restructurer le tout et envoyer tout le monde créer de nouvelles organisations et de nouvelles structures de gouvernance, au lieu de se concentrer sur les résultats réels», avait déclaré M. Kenney aux journalistes, peu de temps avant de se retirer en septembre dernier.

«Ce que nous avons décidé de faire, c’est de nous en tenir à nos façons de faire, de nous concentrer sur les résultats plutôt que de rejouer le cycle sans fin des changements structurels chez l’AHS», avait-il ajouté.

Mme Smith a vivement critiqué le système de santé albertain comme étant trop lent pour répondre aux besoins de première ligne, en particulier pendant la pandémie. L’année dernière, elle avait licencié son conseil d’administration et l’avait remplacé par un seul administrateur.

Le porte-parole de l’opposition en matière de santé du Nouveau Parti démocratique (NPD), David Shepherd, a soutenu qu’il y avait du travail à faire pour résoudre les problèmes au sein de l’AHS, mais s’est demandé si une restructuration en gros le résoudrait et si le gouvernement de Danielle Smith avait la capacité de le faire.

«Nous devons trouver des moyens de mieux travailler avec nos partenaires dans l’ensemble du système et de veiller à ce que toutes les voix soient entendues et prises en compte», a déclaré M. Shepherd.

«(Mais) si (Mme Smith) pense qu’elle peut entrer et simplement déchirer le système à un moment où il est déjà dans le chaos, en partie à cause de tant de décisions prises par son gouvernement au cours de son premier mandat, je pense que nous allons être – comme (Mme Smith) l’a dit précédemment – dans « un trajet cahoteux »», a ajouté l’élu.

Autres objectifs

La lettre de mandat de Mme LaGrange lui ordonne également de continuer à travailler sur la réduction des temps d’attente pour les chirurgies, les soins d’urgence et les tests de laboratoire.

Dans la lettre, Mme LaGrange est également chargée de rationaliser les processus de certification et d’accélérer le recrutement pour trouver plus de médecins, d’infirmières et d’autres professionnels de la santé pour combler les lacunes, en particulier en obstétrique dans le nord de l’Alberta et les régions au sud de Calgary.

Pendant ce temps, la promesse de longue date de Mme Smith de créer des comptes de dépenses de santé a été rétrogradée. 

Les comptes de gestion des dépenses santé étaient une promesse fondamentale de Mme Smith l’année dernière dans sa tentative réussie de devenir cheffe et première ministre du Parti conservateur uni.

Les comptes devaient donner 300 $ à chaque Albertain à dépenser pour des soins primaires adaptés à leurs besoins individuels non couverts par l’assurance-maladie, comme un chiropraticien, un naturopathe ou un conseiller.