Le blocage des nouvelles par Meta met des vies en danger, estime la ministre St-Onge

OTTAWA — La ministre du Patrimoine canadien Pascale St-Onge demande à Meta de mettre fin à son interdiction du contenu d’actualités canadiennes sur Facebook et Instagram, alors que des milliers de personnes tentent d’échapper aux incendies de forêt qui ravagent la Colombie-Britannique et les Territoires du Nord-Ouest.

Mme St-Onge affirme que le géant des médias sociaux met imprudemment la vie des gens en danger en bloquant les articles de presse canadiens sur ses deux plateformes massives.

«Facebook, Meta a décidé de faire passer ses propres intérêts avant la sécurité publique, a-t-elle déclaré samedi dans une entrevue. En tant qu’entreprise, ils devraient agir en bons citoyens corporatifs et revenir sur leur interdiction afin que nous puissions nous assurer que les gens ont accès aux informations dont ils ont besoin.»

Meta a bloqué les nouvelles canadiennes sur ses plateformes de médias sociaux plus tôt ce mois-ci en réponse à la législation fédérale, le projet de loi C-18, qui oblige certains géants de la technologie à payer pour le contenu des nouvelles diffusé sur leurs plateformes. Meta est la société mère de la plateforme Facebook, et elle détient également Instagram.

Pendant ce temps, la Colombie-Britannique et les Territoires du Nord-Ouest ont déclaré l’état d’urgence alors que les incendies de forêt empiètent sur des villes comme West Kelowna, en Colombie-Britannique, et la capitale territoriale de Yellowknife.

Alors que des dizaines de milliers de personnes fuient sous les ordres d’évacuation, elles ne trouvent pas de contenu des médias canadiens sur Facebook ou Instagram pour les mettre à jour avec les dernières informations des autorités.

Le projet de loi C-18 n’est pas encore en vigueur, bien qu’il ait été adopté à la Chambre des communes, a rappelé Mme St-Onge.

Cela signifie que Meta n’est pas encore tenu de payer pour les nouvelles canadiennes publiées sur ses sites. La société, aux côtés d’autres géants de la technologie, des sociétés de médias et des membres du public, sera invitée à peser sur toute réglementation résultant du projet de loi, a-t-elle ajouté. Cette période de consultation commencera dans les prochains jours.

«Facebook a décidé d’abandonner les nouvelles avant même que le projet de loi ne soit pleinement en vigueur, au lieu de participer au processus de consultation et de nous aider à nous assurer que le règlement est bon», a déploré la ministre St-Onge.

«C’est un choix et une décision que l’entreprise a pris. Et maintenant, nous voyons que cela met la vie des gens en danger», a-t-elle renchéri.

Au gouvernement de reculer

Jeff Jarvis, professeur de journalisme à la City University of New York, affirme au contraire qu’il incombe au gouvernement canadien de reculer.

«La ministre du Patrimoine devrait se regarder dans le miroir», a-t-il déclaré samedi en entrevue, ajoutant que le projet de loi C-18 est lui-même «imprudent».

«À maintes reprises, le gouvernement a été averti de ce problème, à savoir que les citoyens du Canada peuvent être privés de sources d’information», a rappelé le professeur.

M. Jarvis estime qu’Ottawa devrait signaler à Meta qu’il est ouvert à la négociation. En réponse, et à la lumière des horribles incendies de forêt, Meta devrait alors reconsidérer son interdiction des nouvelles canadiennes comme une démonstration de bonne foi, croit-il.

Mme St-Onge a déclaré que le gouvernement fédéral est ouvert à négocier avec Meta et elle espère que l’entreprise participera à la période de consultation sur le projet de loi. Cependant, elle n’a pas eu de nouvelles de l’entreprise, qui n’a pas non plus fait connaître ses intentions quant à la consultation, a-t-elle dit.

Dans une déclaration envoyée par courriel vendredi, un porte-parole de Meta a souligné la fonction Safety Check de l’entreprise, qui permet aux utilisateurs de faire savoir à leurs amis Facebook qu’ils sont en sécurité.

Ils peuvent également «demander de l’aide, vérifier si leurs proches sont en sécurité et accéder aux mises à jour de sources fiables», indique le courriel non signé. Ce contrôle de sécurité a été activé pour les incendies de Yellowknife et de Kelowna, a indiqué la compagnie. Les deux incendies ont également une page de crise correspondante montrant des nouvelles de sources internationales.

«Les Canadiens peuvent continuer à utiliser nos technologies pour se connecter avec leurs communautés et accéder à des informations fiables, y compris le contenu d’agences gouvernementales officielles, de services d’urgence et d’organisations non gouvernementales», indique le courriel.

Il n’a été pas précisé si Meta avait l’intention de mettre fin à l’interdiction et de laisser les utilisateurs publier des reportages provenant de médias canadiens.

Note aux lecteurs: Dans une version précédente, on indiquait le ministre Pascale St-Onge au premier paragraphe et il était mentionné M. St-Onge au deuxième paragraphe. Il faut bien lire la ministre et Mme St-Onge. Nos excuses.