Le réseau de la santé mobilisé face aux enjeux de la crise climatique

MONTRÉAL — Les changements climatiques vont continuer de bouleverser de nombreux aspects de nos vies, forçant ainsi l’ensemble de la société à s’adapter. Cela inclut les établissements de santé, qui cherchent de plus en plus à faire leur part. Un investissement de 10 millions $ annoncé mercredi par la Fondation familiale Trottier devrait aider le réseau à accélérer sa transition verte. 

Les impacts des changements climatiques seront multiples, incluant des effets néfastes sur la santé des populations. Rencontrée en marge d’une conférence au Sommet Climat Montréal, la directrice régionale de santé publique de Montréal, la Dre Mylène Drouin, parle de pollution de l’air, de montée des allergènes et de l’apparition de maladies vectorielles ou parasitaires que l’on n’a pas l’habitude de voir dans un climat nordique.

«La canicule de 2018, c’est 63 décès à Montréal et le dôme de chaleur à Vancouver, c’est 600 décès en quatre jours», a-t-elle donné en exemple de ce qui nous attend avec la multiplication des événements météorologiques extrêmes.

Tous ces facteurs environnementaux sont inquiétants en eux-mêmes, mais ils le sont encore plus lorsqu’on réalise qu’ils viennent en interaction avec d’autres enjeux sociaux, a souligné l’ancien directeur national de santé publique devenu sous-ministre adjoint, le Dr Horacio Arruda. Il a cité entre autres choses le vieillissement de la population et la pauvreté.

Pour toutes ces raisons, le réseau de la santé a entrepris d’agir pour décarboner ses établissements et réduire son empreinte écologique globale.

Afin d’aider le réseau à accélérer cette transition verte, la Fondation familiale Trottier a promis d’investir deux millions $ par année pour les cinq prochaines années.

S’il considère qu’il faut accélérer la cadence dans tous les secteurs d’activités, le directeur général de la fondation, Éric Trottier, admet que c’est particulièrement pressant dans le réseau de la santé.

Ces propos ont trouvé écho auprès du président-directeur général du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, Jean-François Fortin-Verreault. Dans le cadre d’un panel sur le sujet, il a reconnu que le réseau était «très, très, très, très en retard».  

Les fonds de la Fondation familiale Trottier devraient servir à décarboner les hôpitaux et les établissements de santé ainsi qu’à rendre ces institutions plus résilientes face aux changements climatiques. On vise d’abord les établissements de santé du Grand Montréal, mais le projet devrait par la suite s’étendre à l’ensemble du Québec.

D’abord et avant tout, la fondation a créé le programme Santé-Climat à partir duquel les 10 millions $ seront redistribués. Quatre premières actions ont déjà été identifiées et devraient être déployées dès cette année.

Bâtiments, transport, alimentation

Le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) devrait réduire ses émissions de gaz à effet de serre provenant de l’utilisation de gaz anesthésiants. On explique qu’à peine cinq pour cent du gaz est absorbé par le patient alors que le reste s’échappe. On veut être en mesure de capter ces gaz et de les traiter afin d’éliminer les GES. Cette initiative pourrait éliminer jusqu’à 550 tonnes de GES par année.

Une autre part de l’argent a été attribuée à l’entreprise d’économie sociale Synergie santé environnement afin qu’elle réalise une trentaine d’inventaires de GES pour des établissements de santé dans le but éventuel d’éliminer ces émissions de GES. 

Puis, une autre initiative vise à identifier les endroits où la qualité de l’environnement est défavorable dans le but de sensibiliser la population et les décideurs aux iniquités territoriales et aux impacts sur la santé publique.

Finalement, on souhaite élaborer des solutions pour intégrer l’action climatique et le principe de carboneutralité dans le réseau de la santé. 

On estime que le réseau de la santé est responsable de 5 % des émissions de GES au Québec. Or, le réseau est également très énergivore. D’après des chiffres évoqués par Jean-François Fortin-Verreault, 25 % des immeubles publics de Montréal font partie du réseau de la santé, mais ils consomment 50 % de l’énergie.

Au-delà des projets financés par la fondation, le réseau se mobilise aussi pour trouver toutes sortes de moyens afin d’améliorer la valeur durable de ses immeubles. On cherche aussi à réduire les émissions liées aux transports, qu’il s’agisse des usagers, des employés ou même des services d’urgence.

Plusieurs intervenants ont aussi souligné l’importance de s’intéresser au volet alimentaire. D’où proviennent les aliments? Comment sont-ils consommés, valorisés?

Tous ces efforts ont pour but de contribuer à lutter contre la crise climatique, mais elle est bien en marche et ses conséquences sont réelles. D’ailleurs, la menace qui plane au-dessus du réseau de santé, c’est sa capacité de résilience face aux catastrophes et autres aléas du climat.

Les hôpitaux tiendront-ils le coup en cas d’inondation ou de tempête de verglas? Comment prendre soin de milliers de patients hospitalisés à domicile en cas de tempête majeure? Il faudra trouver des réponses à toutes ces questions, et plus tôt que tard.

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