Les coûts du régime de soins dentaires seraient surévalués par Ottawa, selon le DPB

OTTAWA — Le directeur parlementaire du budget estime que le régime fédéral de soins dentaires coûtera près de 3 milliards $ de moins que ce que les libéraux prévoyaient ce printemps, en supposant que les gouvernements provinciaux n’abandonnent pas leur propre couverture.

Les libéraux ont promis un régime d’assurance dentaire autonome pour les Canadiens à revenu faible ou moyen qui ne sont pas couverts par une assurance collective. Cette promesse fait partie de l’«entente de soutien et de confiance» conclue l’an dernier avec les néo-démocrates pour éviter le déclenchement d’élections anticipées.

Le programme de soins dentaires devrait être lancé avant la fin de 2023, en commençant par les personnes admissibles de moins de 18 ans, les personnes handicapées et les aînés. 

Les libéraux avaient initialement réservé 5,3 milliards $ sur cinq ans pour lancer ce programme. Mais ils ont rehaussé cette prévision à 13 milliards $ dans le plus récent budget de mars dernier, en se basant sur des estimations internes du coût réel du programme.

Le directeur parlementaire du budget (DPB) suggère plutôt que le coût sera plus près de 10,1 milliards $, grâce en partie à la couverture d’assurance dentaire existante dans certaines provinces et aux quotes-parts payées par certains bénéficiaires.

Le DPB souligne par contre que si les provinces abandonnaient leur couverture existante et renvoyaient plutôt leurs bénéficiaires vers le régime fédéral, l’estimation augmenterait et le coût serait de 2 milliards $ de plus que le budget prévu jusqu’ici par le gouvernement.

«La collaboration avec les provinces et les territoires est absolument essentielle, même si seulement 5 % des frais dentaires actuels sont couverts par des régimes» provinciaux et territoriaux, a soutenu mercredi le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, en conférence de presse à Bedford, en Nouvelle-Écosse.

Offre variable selon les provinces

La couverture des soins dentaires au Canada forme une courtepointe de régimes privés, provinciaux et fédéraux qui varient considérablement d’un bout à l’autre du pays. Les provinces offrent généralement des programmes pour les familles à faible revenu, et plusieurs couvrent les soins dentaires de base pour les enfants, mais le niveau de couverture et les paniers de services ne sont pas uniformes à l’échelle du pays.

Le gouvernement libéral et le Nouveau Parti démocratique cherchent à combler les brèches sans perturber la couverture existante. L’objectif ultime est d’offrir une couverture dentaire aux personnes dont le revenu du ménage est inférieur à 90 000 $ par année et qui n’ont pas d’assurance privée ou d’assurance collective au travail.

Les Canadiens pourront combiner la couverture provinciale et fédérale, mais les détails de ces arrimages ne sont pas encore connus. «Le plan fédéral va le rendre plus homogène et beaucoup plus solide pour les familles à revenu faible et moyen du pays», a assuré M. Duclos mercredi.

Certains experts en politiques publiques et des membres de l’opposition craignent que la création du programme fédéral n’incite des provinces à supprimer ou à réduire leur offre et à encourager leurs citoyens à se tourner vers Ottawa.

M. Duclos soutient que la majorité des familles à revenu moyen ne seraient de toute façon pas admissibles aux programmes provinciaux, et que les familles couvertes se voient généralement offrir un panier de services assez restreint.

«La prévention, malheureusement, fait défaut dans de nombreux contextes. Les familles n’amènent pas leurs enfants chez le dentiste, chez l’hygiéniste dentaire, et cela entraîne des problèmes qui sont plus coûteux et plus difficiles à traiter par la suite», a-t-il dit. 

Le directeur parlementaire du budget a basé certaines de ses projections sur l’autre régime de soins dentaires administré par le gouvernement fédéral, le Programme des services de santé non assurés, offert aux membres des Premières Nations et aux Inuits.

Les coûts d’administration du régime fédéral ont été quant à eux estimés en fonction des coûts provinciaux moyens pour des programmes similaires, mais le directeur parlementaire du budget affirme que les coûts fédéraux pourraient être plus élevés, selon les modalités exactes du régime.

Pendant qu’il élabore le régime permanent, le gouvernement a créé l’année dernière une prestation temporaire, en espèces, pour les enfants non assurés sous la limite de revenu des ménages de 90 0000 $. Plus de 300 000 enfants ont depuis eu droit à un remboursement partiel de leurs frais de soins dentaires.

Selon le ministre Duclos, ces chiffres prouvent que la couverture fédérale était nécessaire.