Mélanie Joly dit avoir été rassurée par Kyiv sur la lutte à la corruption en Ukraine

OTTAWA — La ministre canadienne des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a vanté la récente répression de la corruption en Ukraine menée par le gouvernement du président Volodymyr Zelensky, et a promis de l’argent pour aider à renforcer la reddition de comptes dans le pays.

Le gouvernement ukrainien est aux prises avec un scandale de corruption qui a éjecté de leurs sièges plusieurs hauts fonctionnaires, y compris au sein du ministère de la Défense du pays.

La corruption n’est pas un phénomène nouveau en Ukraine, M. Zelensky étant arrivé au pouvoir en 2019 sous la promesse de l’éradiquer. Mais ce scandale a émergé alors que le Canada et ses alliés acheminent des milliards de dollars d’aide dans le pays pour aider à lutter contre l’invasion de la Russie.

La portée exacte du scandale reste inconnue. Selon certaines informations qui ont circulé cette semaine, le ministre ukrainien de la Défense, Oleksii Reznikov, devait être limogé. Il ne l’a pas été, mais plusieurs de ses adjoints ont été remplacés.

Les allégations ratissent large, concernant notamment des pots-de-vin pour l’achat de nourriture pour les forces armées ukrainiennes, l’utilisation personnelle de voitures de luxe et le détournement de plus de 7 millions $ US d’aide humanitaire.

Mme Joly n’a pas immédiatement mentionné le récent scandale lorsqu’elle a annoncé les plans du Canada visant à financer une gamme de mécanismes qui pourraient contribuer plus largement à la reddition de comptes.

Le plan comprend des millions pour aider la police ukrainienne à enquêter et à poursuivre dans les cas de crimes sexuels, y compris ceux perpétrés par les forces russes durant leur invasion du pays.

La ministre a également promis de l’argent pour renforcer les médias locaux et les ONG, avec un accent particulier sur les reportages sur les lignes de front de la guerre, qui marquera son premier anniversaire la semaine prochaine.

Mais Mme Joly a ensuite souligné l’importance de lutter contre la corruption en Ukraine en même temps que l’armée du pays combat les forces russes, avant de saluer «l’action rapide» du gouvernement Zelensky sur la question.

Dans une conférence téléphonique depuis la Pologne, Mme Joly a déclaré que le Canada était «très satisfait du fait que, même s’ils se concentrent sur la défense de leur souveraineté et de leur intégrité territoriale, ils sont en mesure de poursuivre ces réformes démocratiques et de lutter contre la corruption».

«Parce que cela correspond à ce pour quoi ils se battent sur le champ de bataille et à ce que demandent également les pays occidentaux, dont le Canada», a-t-elle souligné.

La ministre Joly a déclaré qu’elle avait aussi exprimé les préoccupations du Canada au sujet de la corruption avec le principal conseiller du président, ainsi qu’avec le procureur général et ministre des Affaires intérieures, Ihor Klymenko, qui est responsable des forces de police du pays.

Alors que les Ukrainiens combattent la Russie sur le champ de bataille pour le droit de vivre dans une démocratie libre, il est important «que les valeurs qui sous-tendent la démocratie soient protégées», a-t-elle déclaré.

Les Ukrainiens et les Canadiens ne sont pas les seuls à surveiller de près la situation. À Washington, le comité des forces armées de la Chambre des représentants prévoit d’organiser des réunions d’information mensuelles classifiées pour les législateurs afin de détailler, dollar par dollar, la manière dont l’aide à la sécurité américaine est allouée.

Des armes lourdes attendues

Même si l’Ukraine fait face à la perspective d’une surveillance accrue, Mme Joly a déclaré que le Canada poussait d’autres alliés à fournir plus de chars de combat et d’autres armes lourdes pour aider les forces ukrainiennes à vaincre leurs adversaires russes.

Le Canada a promis quatre chars Leopard 2 de fabrication allemande le mois dernier, qui ont tous été transportés depuis en Europe. Mais alors que les États-Unis et certains alliés européens ont emboîté le pas, l’engagement global des pays européens n’a pas été à la hauteur des attentes.

Le ministre allemand de la Défense Boris Pistorious a été cité en marge d’un sommet de l’OTAN cette semaine comme exprimant sa frustration quant au rythme des engagements, après que son gouvernement a approuvé la fourniture de Leopard 2 par les pays qui les possèdent.

«Nous sommes très fiers d’être le premier pays à avoir envoyé des chars, car nous pensons qu’ils auront un impact sur le champ de bataille, a déclaré Mme Joly. Et j’espère que de nombreux autres pays européens pourront très bientôt envoyer leur propre artillerie lourde.»

Ottawa a tenté de garder secrète la visite de Mme Joly pour des raisons de sécurité, mais le président Zelensky a publié mardi une vidéo de sa rencontre avec la ministre canadienne des Affaires étrangères.

Lors de sa visite, la ministre s’est également entretenue avec la première dame d’Ukraine, Olena Zelenska, du soutien aux femmes victimes de violences sexuelles et elle a annoncé un versement de 3 millions $ pour aider des groupes locaux qui travaillent à stabiliser le pays. 

Mme Joly a visité des projets financés par le Canada, comme un programme de déminage géré par le HALO Trust, une organisation humanitaire non gouvernementale, et elle a promis des contributions canadiennes continues pour le retrait de mines.

Cette visite de la ministre canadienne en Ukraine est la deuxième depuis l’invasion russe il y a près d’un an; Mme Joly s’était également rendue dans ce pays en tant que ministre des Affaires étrangères en janvier 2022.

Les députés membres du Comité des affaires étrangères des Communes doivent partir prochainement pour une tournée des pays voisins de l’Ukraine, afin de comparer les réponses à l’invasion russe.