Une femme veut que sa poursuite contre la Fondation Trudeau soit entendue à T.-N.-L.

MONTRÉAL — Une femme qui a intenté une poursuite au civil contre la Fondation Pierre-Elliott-Trudeau porte en appel une décision de la Cour suprême de Terre-Neuve-et-Labrador, qui a tranché que la cause devrait être entendue au Québec plutôt que dans cette province de l’Atlantique.

Cherry Smiley allègue qu’elle a été victime de gestes sexuels inappropriés par l’ancien premier ministre des Territoires du Nord-Ouest Stephen Kakfwi lors d’un événement organisé par la fondation à Saint-Jean, en 2018.

M. Kakfwi avait été nommé le mentor de Mme Smiley dans le cadre d’un programme de bourses offert par la Fondation Trudeau.

L’avocate de Mme Smiley, Me Kathryn Marshall, estime que le tribunal a erré lorsqu’il a jugé qu’il n’avait pas juridiction dans ce dossier et que la poursuite devrait plutôt être intentée au Québec, où se trouve le siège social de la Fondation Trudeau.

«On pense que le tribunal n’a vraiment pas pris en compte le fait que la plaignante est une survivante d’un événement sexuel traumatisant», a souligné Me Marshall lors d’une entrevue avec La Presse Canadienne, jeudi.

Mme Smiley, qui vit actuellement à Vancouver, a d’abord déposé sa poursuite en Colombie-Britannique en 2021, mais elle l’a retirée lorsque la fondation s’est opposée à ce que la poursuite se déroule dans cette province.

La femme a ensuite fait une deuxième tentative du côté de Terre-Neuve-et-Labrador, où les faits allégués se seraient produits. La Cour suprême de la province a cependant jugé qu’elle n’avait pas juridiction dans cette affaire.

Me Marshall croit que sa cliente pourrait être confrontée à des difficultés linguistiques et financières si on la forçait à déposer sa poursuite au Québec, où le système de poursuites au civil est différent du reste du pays.

Selon l’avocate, intenter une poursuite contre une institution comme la Fondation Trudeau est une épreuve assez difficile qu’il n’est pas nécessaire que le système judiciaire en rajoute.

«Quand le tribunal vous répond qu’il ne peut rien faire et que vous devriez aller ailleurs, même si l’agression s’est passée ici, c’est comme voir la porte se fermer droit devant vous», a-t-elle imagé.

La poursuite désigne M. Kakfwi et la Fondation Trudeau comme défendeurs.

On peut y apprendre que lors d’un événement de la fondation à Saint-Jean, M. Kakfwi aurait rapproché Mme Smiley à deux reprises près de son corps et «a attrapé son bras près de sa poitrine».

La poursuite allègue que l’homme aurait ensuite serré et massé son bras «pendant une période prolongée». Il aurait également invité Mme Smiley à plusieurs reprises à se rendre chez lui à Yellowknife, une fois en lui tenant le bras.

Dans sa décision du 19 juillet, le juge Peter Browne a conclu que même si les événements auraient eu lieu à Saint-Jean, Mme Smiley et M. Kakfwi devaient se trouver à Terre-Neuve-et-Labrador en vertu d’ententes avec la Fondation Trudeau qui étaient régies par les lois du Québec.

Il a également constaté que tenir la poursuite à l’extérieur du Québec, où résident la plupart des témoins, serait un fardeau financier pour la fondation.

La Fondation Trudeau a déclaré jeudi après-midi qu’elle n’avait pas encore reçu d’avis d’appel. Elle a donc refusé de commenter, citant le fait que l’affaire est toujours devant les tribunaux.

M. Kakfwi a déposé une déclaration de défense, niant avoir eu avec elle tout contact qui «pourrait être interprété comme étant de nature sexuelle».